Maléfique se promène par cette belle journée sur les terres arides. Elle aime cette sensation de mort qui traine à cet endroit. Ce silence et ce calme emprunt de sérénité qui lui permettent de ce ressourcer. Elle a laissé partir Hel sous sa forme de corbeau vers le royaume de Phillip. Depuis quelques jours le beau prince n’est pas venu lui rendre visite et cela lui manque. Elle aime quand leur corps livre bataille, en plus elle en connait l’issus et elle sait qu’à chaque fois elle aura gain de cause. Alors elle vient ici noyer son chagrin, enfin façon de voir ce qu’elle ressent quand il n’est pas là. C’est comme une torture donc elle ne peut pas vaincre la douleur. Pourtant elle a essayé, plusieurs fois même, elle a usé de magie et de sortilège mais rien n’y fait. Elle l’a dans la peau et l’attraction qu’il a sur elle est bien trop puissante pour être balayé d’un simple coup de main. Elle lève les yeux au ciel, cherchant Hel, qui petit à petit disparait de son horizon. Elle l’envie, elle est prise aux tripes quand elle repense à ce que lui procuraient ses ailes. Cela la tue à petit feu. Elle s’en veut de se sentir faible dans ses moments là. « Phillip, mes ailes, pourquoi faut-il que je pense toujours à tout ça ? » Elle est en rage, en colère, elle voudrait crier sa haine vers les humains, vers ce qui lui ont fait subir bien des années plus tôt mais rien ne sort. Elle garde tout à l’intérieur amplifiant la douleur qui lui brise le cœur ou du moins ce qui lui en reste. Mais elle reprend vite le dessus, et pour faire sortir sa rage et sa douleur, une boule de feu puissante et rouge, sort de ses mains fonçant en direction de l’arbre mort qui se trouve juste devant elle. Un bruit de branche brisée lui fait dévier son tir. Elle se retourne et se retrouve face à un … Loup d’une beauté à couper le souffle.

Le regard de Maléfique plonge au creux de celui de la bête qui se trouve à quelques mètres d’elle. Elle n’a pas peur, au contraire elle est subjuguée, elle voit dans les yeux du loup tellement de chose. « Tu fais quoi ? Comment es tu arrivé la ? » Landasia est une terre entourée d’un lac, comment un loup a-t-il pu le franchir. D’accord il sait nager, mais bon pourquoi venir se perdre ici où rien ne vit. Un tas de questions assaillent l’esprit de Maléfique, elle laisse ses yeux glisser sur le pelage de la bête, il a l’air doux et soyeux, rien à voir avec les loups qu’elle a déjà croisé. « Tu es beau. » Elle parle avec douceur pour ne pas l’effrayer. « Tu as l’air puissant. » Elle ne peut s’empêcher de remarquer la musculature sous le pelage. « N’aie pas peur … je ne te ferai pas de mal. » Un humain quelconque elle l’aurait déjà embarqué pour le torturer, pour savoir pourquoi il avait osé franchir les limites et pénétrait dans son royaume sans y être invité. Mais un loup, non cet animal se respecte. Il représente tellement de symbole, il est même lié à la magie. Et Maléfique est certaine qu’il est là pour une bonne raison. Puis elle la sensation de voir dans son regard autre chose que le loup, mais c’est si loin, si discret qu’elle pense avoir rêvé. Elle avance doucement vers lui tendant sa main pour le toucher, mais avant elle lui laissera le loisir de la flairer. Et au cas où il voit en elle plus qu’une femme, elle laisse ses yeux prendre la couleur et l’aspect des yeux de la dragonne qui l’habite. Juste pour lui montrer, le rassurer. Alors son regard vire doucement au doré, et ses pupilles se font différentes. « Je veux juste te toucher. » Elle avance prudemment, la distance qui les sépare se fait plus petite. Elle peut presque sentir sa respiration. « Tu as surement faim … tu n’as pas du trouver grand-chose ici. » Elle lui sourit cela lui parait au départ idiot, sourire à un loup, mais au fur à mesure qu’elle s’avance elle a la sensation qu’il est plus que cela. Mais elle n’arrive pas à savoir quoi ? « Tu protèges un secret et tu le protèges bien. Mais moi aussi j’ai des secrets et je peux les partager si tu me dis les tiens. » Sa voix est toujours douce, peut être plus qu’avec n’importe qui depuis bien des années. Sa main vient alors effleurer les poils du dos du loup, il recule. « Je ne te ferais aucun mal. » Répète t-elle. Mais elle sent qu’au fond il doute, ou alors il a peur, ou bien ne lui fait-il pas assez confiance pour la laisser aller plus loin. Alors elle attend qu’il vienne à elle, et elle laisse encore leurs yeux s’affronter dans la douceur. Aucune haine dans le regard de Maléfique, un profond respect à l’égard de cet animal qu’elle trouve à la fois sublime et mystérieux. Lui laissera t-il la chance de l’approcher vraiment ? Lui laissera t-il la chance de voir bien plus loin dans son regard ? En tout cas elle lui offre le sien et tout le loisir de découvrir ce qu’elle est vraiment.

Chaque pas devenait épuisant, à chaque fois que l'une des pattes du loup sombre c'était la même chose. Certes il ne sentais pas la douleur de ses articulations, le poids des muscles endoloris à force de courir, mais il sentait le manque de force, l’endurance arriver à son terme. Il se fichait bien du nombre de jours qu'il avait passé à voyager presque sans arrêt, ce n'était pas comme si il était prit par le temps, que du contraire, il en avait probablement trop devant lui. Même coupé de la routine et des conventions humaines, hors de toutes ces choses qui n'étaient plus faites pour lui, le temps l'existence lui paraissait vide, comme s'il était devenu un fruit pourri qui avait laisser passer ses années de gloire. Avancer jusqu'au bout de ce monde lui vidait l'esprit, se focalisant sur son avancée en laissant l'animal reprendre le dessus, restant à demi-conscient par moment. Il n'avait plus rien de l'autre côté des eaux qu'il avait traversé. Il ne faisait plus partie de ces terres maudites qui l'ont rongé jusqu'à la moelle. Qu'avait-il encore d'humain d'ailleurs ? Juste l'apparence lorsqu'il la reprenait, rien d'autre et c'était probablement mieux ainsi. Il n'était plus qu'une boule de nerfs creuse munie d'un instinct aiguisé à l'extrême et de crocs acérés.

En plus de l'épuisement, un autre problème était là depuis un bon moment déjà : il mourrait de faim. Cette sensation affreuse que son propre estomac se rongeait lui-même de l'intérieur devenait une obsession. Une odeur lointaine vint chatouiller son museau, imaginant déjà le goût de la chair entre ses crocs parfaitement aiguisés. Il se mit en chasse, comptant sur ses dernières réserves pour se propulser dans ces terres arides et dépourvues de vie. Drôle d'endroit pour venir y faire une balade, quelle sorte d'âme un tant sois peu logique viendrait s'y perdre ? Une silhouette finit par se dessiner au loin, celle d'une jeune femme peut-être un peu trop maigre pour qu'il puisse tenir longtemps, mais il n'allait certainement pas cracher dessus.

Bien vite quelque chose clocha. Randall resta à bonne distance, le yeux rivés sur la brune qui venait d'user de la magie. Une proie pas assez simple pour son niveau de fatigue. Certes il était suicidaire, mais pas à ce point non plus. Dans un souffle qui s'apparentait à un soupir, il rebroussa chemin, brisant un morceau de bois par la même occasion tout en oubliant sa discrétion dans son élan de déception. Immédiatement, il tourna la tête vers la demoiselle qui venait de remarquer sa présence. L'avantage avec cette forme, c'est qu'il ne perdait pas son temps avec toutes sortes de conventions humaines comme la discussion. Instinctivement, le loup au pelage sombre adopta une position défensive, les oreilles baissées en arrière, les yeux rivés vers la jeune femme et les crocs dehors. Après avoir vu ce dont elle était capable, mieux valait prévenir que guérir. Mais il laissa bien vite tomber sa méfiance - du moins celle qu'on pouvait percevoir extérieurement - lorsque la sorcière, ou quoi que ce soit d'autre, ne sembla pas hostile, mais plutôt en pleine phase d'admiration. Durant un court instant, il hésita à mettre les voiles, incapable de faire confiance à quoi que ce soit surtout dans un endroit pareil.

Au moment où l'inconnue s'approcha, il eut un mouvement de recul, prêt à décamper sur le champ, mais quelque chose l'intrigua, éveillant sa curiosité. Son regard avait changé, cette teinte dorée était trop étrange. Soit un tour de magie pour l'embobiner, soit quelque chose d'autre. Il ne bougea pas d'un pouce, ne la quittant pas du regard histoire de voir ce qu'elle comptait faire. Au moment même où elle mentionna la faim, son estomac s'exprima pour lui, laissant échapper un grognement aussi sinistre que s'il était sortit par sa gueule. Il écarquilla les yeux, lui même étonné d'entendre un son aussi terrifiant. Un réflexe peut-être un peu trop humain, mais c'était le coup de la surprise. Son estomac semblait être hanté par une force obscure, menaçant presque de sortir dévorer ne serais-ce qu'un insecte pour se rendormir.

Ce n'était pas parce qu'il avait relâché deux seconde son regard qu'il n'était plus sur ses gardes. Lorsque la main s'approcha un peu trop, il recula lentement, montrant les crocs à nouveau. Il n'était pas une peluche qu'on pouvait câliner à sa guise, loin de là et il valait peut-être mieux le lui montrer avant de finir en laisse. Il attendit un bref instant, mais rien y fit, elle ne rebroussa pas chemin, ce qui signifiait donc qu'elle pourrait probablement le rôtir sur place puisque toute personne censée serait partie en hurlant. Toujours intrigué, il se mit à lui tourner autour pour la détailler, ne la lâchant pas du regard avant de revenir se planter juste devant elle, s'asseyant doucement, ce qui lui fit un bien fou. Il pencha légèrement la tête sur le côté, baissant une oreille ce qui en disait plutôt long sur sa curiosité. Mitigé, il attendait d'en voir plus avant de ce décider entre partir et en savoir plus. Puis, avec un peu de chance elle sortira un bon morceau de viande de sa poche magique, même s'il ne fallait pas rêver.

Maléfique ne pense pas faire de rencontre au cours de sa promenade, à vrai dire les rencontres sur les terres de Landasia sont rares. Alors lorsqu’elle se trouve face à un loup, elle est à la fois surprise mais aussi fascinée. La bête est magnifique et pourrait presque paraitre irréelle. Comme a-t-il pu arriver là ? Pourquoi ? Un tas de question se bousculent dans la tête de Maléfique, elle est à la fois intriguée et subjuguée. Des loups elle en a vu, mais pas sur ces terres arides, sans vie, ici il court à sa perte. Mais lui à autre chose, son regard est des plus troublant. Entre eux commencent alors un petit jeu, ils se jugent, se testent, qui à peur de qui ? En tout cas il n’a pas l’air d’avoir envie de fuir, il a surement faim et ce n’est pas ici qu’il trouvera ce quoi ce remplir l’estomac. Elle essaie par la voix de le mettre en confiance, comme persuadée qu’il comprend chacune de ses paroles. Elle évite les gestes brusques, ne voulant le faire fuir. Maléfique est sure que ce n’est pas qu’un simple loup, qu’il y a autre chose de bien plus puissant derrière son regard menaçant. Mais en elle aucune peur de toute façon s’il tentait quoi que ce soit sa magie pourrait le réduire en cendre. Alors elle s’avance, voulant juste le toucher.

Au départ le loup recule, chose tout à fait logique, la bête se méfie, il n’a peut être pas peur car Maléfique n’a rien vu dans son regard pouvant lui faire penser cela. Mais il se méfie d’elle, ce qui parait logique surtout s’il l’a vu et surtout s’il a compris ce qu’elle faisait avant qu’ils ne se trouvent l’un en face de l’autre. Comme pour le rassurer et lui montrer qu’elle aussi est différente, elle laisse ses yeux se paraient de leur éclat doré. Ainsi il sera peut être rassuré et ne voudra pas fuir sa main. Leurs regards ne se quittent pas, mais le loup est trahi par sa faim, Maléfique était sure qu’il était affamé. Et ce n’est pas sur ces terres arides qu’il a du trouver son bonheur, n’y qu’il le trouvera. Elle a l’impression d’entendre l’écho du grognement des dragons quand ils sont dans leurs grottes, lorsque son estomac laisse avouer son envie de manger. Elle se retient de rire, ne voulant pas le vexer. Elle a presque pitié, sachant à quel point la faim est destructrice autant chez les humains que chez les animaux. Combien de fois elle a vu son Croque-Mitaine à la limite de la folie par le manque de chair humaine.

Mais même si le loup a un instant perdu sa concentration, il est toujours sur ses gardes et lorsque la main de Maléfique frôle son poil, il montre les dents et recule. Mais elle ne compte pas abandonner, elle est consciente que seul ici le loup ne s’en sortira pas. S’il veut manger il va falloir qu’il se laisse toucher, car oui elle peut lui donner ce dont son estomac a envie de se délecter. Faut juste qu’il se laisse approcher et elle lui donnera tout ce qu’il souhaite pour son souper. « Alors on se méfie … mais si tu me laisses te toucher … » Elle le regarde alors qu’il se met à lui tourner autour comme pour la juger, lui faire passer un genre d’épreuve. Elle ne bouge pas le laissant faire, après tout il a lui aussi le droit de voir à qui il a affaire. Le loup vient se placer juste devant Maléfique, il s’assoie et commence à pencher la tête sur le côté. « Monsieur a fini son inspection, prêt pour le dialogue.. » Maléfique décide alors de se baisser pour se mettre plus à sa hauteur, ainsi il n’aura pas besoin de lever sa tête et elle n'aura pas besoin de baisser son regard. « Je sais que tu crèves de faim et je peux arranger cela .. » Alors elle tend sa main dans sa direction. « Tu as envie de quoi, de viande de mouton, de viande de bœuf … de la viande bien saignante … » Leurs regards se sont pas lâchés, et les yeux de Maléfique sont toujours aussi dorés, elle cherche dans le regard du loup une étincelle qui lui livrerait une part de son secret. Elle est sure qu’il se cache autre chose derrière cette bête, elle sent la magie qui entoure le loup. Elle est presque certaine qu’il est bien plus qu’un simple loup. « Ou alors as-tu envie d’un repas digne d’un roi … je peux t’offrir les deux … » La main de Maléfique alors s’agite laissant apparaitre autour d’elle une sorte de lumière. « Alors une viande cru et chargé de sang ou bien un plat plus digne de l’être qui se cache derrière ce regard de loup. » Elle le laisse choisir, elle ne l’obligera en rien. Elle lui offrira le repas qu’il souhaitera. S’il veut rester loup, il aura droit à un plat digne de la bête qu’il est. Si maintenant il lève le voile sur son identité, elle lui offrira le gite et le couvert comme il est juste qu’il est. « A toi de choisir, je peux t’offrir les deux. » Et sans quitter les yeux du loup elle laisse sa magie faire apparaitre un morceau de viande rouge et un plat sous cloche. « Alors tu as envie du quel ? » Mais le repas est pour le moment entouré d'un sort, elle libérera celui pour le loup s'il choisi de rester sous sa forme de bête. Ou lui donnera libre accès à l'autre s'il dévoile sa véritable apparence, ce qui faciliterait aussi le dialogue. Mais pour le moment le loup et toujours loup.

Évidemment qu'il se méfiait, qu'est-ce qu'elle croyait ? Un simple loup aurait déjà rebroussé chemin, c'était un exploit qu'il reste planté là devant elle. D'ailleurs il aurait peut-être mieux fait de déguerpir pour trouver ne serais-ce qu'un rongeur histoire de ne pas mourir de faim. Sa curiosité finira par le perdre, c'était certain. Ah le dialogue, plutôt courir et elle risquait fort d'attendre longtemps. Hors de question de se montrer sous sa forme humaine, une apparence qu'il avait finit par juger faible et certainement pas de taille face à un tel phénomène surtout dans tel un état d'épuisement. Il ne la quitta pas du regard. Déjà c'était une bonne chose elle se mettait à son niveau, enfin bonne ... tout était relatif dans cet univers où les faux semblants dominent.

Puis il y eu cette petite phrase qui lui fit presque écarquiller les yeux. Etait-il en train de délirer où elle parlait bien de nourriture ? De la vraie ? Celle qui glisse agréablement sous la dent ? Le regard du loup se posa sur sa main, hésitant. Etait-il désespéré au point de foncer les quatre pattes dans les bras d'une parfaite inconnue qui prétendait vouloir lui offrir de la nourriture ? Probablement, mais vu les circonstances il n'aurait pas trop le choix. Lorsqu'elle commença à faire usage de la magie, l'animal recula d'un pas, les crocs à nouveaux dehors, menaçant. Il n'aimait pas du tout ça et rien qu'à l'idée qu'elle pouvait le changer en chiot, il avait cette envie furieuse de décamper.

Mais ce qu'elle fit apparaître sous ses yeux le fit sérieusement réfléchir. L'odeur de la viande fraîche vint lui chatouiller la truffe, le faisant déjà saliver au point de s'en lécher les babines. L'instinct reprenait le dessus, prêt à bondir sur le met encore saignant. De toute manière il aurait put avaler n'importe quoi. Il ouvrit déjà la gueule, s'approchant de cet énorme morceau de viande fraîche, n'attendant plus qu'elle lève le voile, du moins jusqu'à ce qu'une autre odeur ne l'enrobe avec douceur. Cette dernière provoqua un nouveau hurlement de son estomac. Randall, prêt à se jeter sur sa proie tourna la tête vers cette cloche étrange.

En plein conflit interne il resta figé quelques longues secondes, son regard aussi doré que celui de l'inconnue rivé sur ce "repas de roi". Oh que non, ce n'était pas le moment de se laisser acheter pour si peu encore moins par une pseudo promesse qui ne cachait probablement pas grand chose. D'un autre côté, depuis quand n'avait-il pas eu de la bonne nourriture tout à fait humaine et préparée avec soin dans la bouche ? Probablement trop longtemps. Cette pensée lui fit presque revenir les conventions humaines, celle du remerciement de vive voix, celle du dialogue. N'importe quoi ! Depuis quand s'inquiétait-il de ce genre de chose ?

C'est un peu inconsciemment qu'il se redressa pour tourner autour de l'argenterie, humant une fois de plus l'odeur alléchante qui s'en dégageait, presque porté par celle-ci. Trop tard, il se laissa aller dans sa métamorphose qu'il n'avait plus faite depuis trop longtemps ce qui n'était pas vraiment judicieux vu la fatigue qui risquait de s'accentuer. Il sentait chacun de ses os se briser, chaque parcelle de son corps se changer dans un souffle saccadé. S'il ne sentait pas le mal que tous ces changements étaient censé faire, il sentait juste ses dernières forces s'envoler avec ses crocs et ses griffes. Bientôt le loup ne fut plus qu'une chose informe qui s'apparentait un peu plus à un homme à chaque seconde.

Randall était redevenu Randall, juste un homme, nu, recouvert de crasses de la tête au pied et de quelques plaies. Il se fichait bien de son apparence, il aurait pu se changer en troll peu ragoûtant, ça lui importait peu. Son regard devenu cyan se posa un bref instant sur ses mains qu'il n'avait plus vu depuis peut-être trop longtemps. Il se releva sur ses deux jambes, manquant presque de tomber par la même occasion. On pouvait presque le prendre pour un nouveau né qui marchait pour la première fois. Enfin, il posa son regard sur la jeune femme qu'il surplombait à présent, bien embêté de s'être dévoilé ainsi pour si peu. Tout ça pour de la nourriture, décidément il était pire qu'un enfant.  « Bonjour » murmura-t-il enfin, redécouvrant sa propre voix et les sons qu'il pouvait faire par la même occasion. Il resta tout de même méfiant un instant, totalement dépourvu de moyen défensif cette fois, mais il était prêt à reprendre sa forme de loups en moins de quelques secondes s'il le fallait.

Maléfique n’est pas pressée, elle s’est être patience quand l’enjeu vaut le coup. Elle sait combien il peut être dur d’accepter sa vraie nature. Selon depuis quand l’humain est loup il pourrait avoir du mal à se retransformer. Ou alors avoir peur tout simplement. Le loup le rendant plus fort et surtout lui ôtant tout raison d’accepter ses contraintes d’homme. Ils s’observent, se jugent, cherchent à savoir exactement ce que veut l’autre. Maléfique ignore pourquoi un tel sort de transformation c’est abattu sur lui. Quelqu’un lui a-t-il lancé ? Ou alors c’est le désespoir qui a fini d’avoir raison de l’humain et qui a fait sortir la bête enfouit au plus profond de son être et de son âme. Maléfique sait très ce que le désespoir peut faire faire, elle sait très bien comment l’être humain peut être faible et comme il lui est facile de ce laisser emporter par ses instincts les plus bas.  Elle en est la preuve parfaite, la perte de ses ailes a fait d’elle cet être craint et sans pitié. Qu’a-t-il bien put se passer pour ce loup ? Toutes ses interrogations lui assaillent la tête, elle cherche dans le regard de la bête une réponse il n’y a que de la crainte pour le moment. Mais le loup ne la fuit pas, même s’il recule à certains de ses gestes, il ne l’a fuit pas. C’est déjà une bonne chose, après reste à savoir ce qui va se passer et s’il va lui faire un tant soit peu confiance. Et pour aider à cela elle lui offre une solution, lui propose de calmer son appétit vorace.

Maléfique use alors de magie, puis elle attend sachant qu’à un moment le loup ou l’homme cédera à ce qu’elle propose. Comment résister quand on est affamé à un plat de viande crue ou bien à un plat chaud et délicieux ? Qu’importe sa méfiance encore à son égard, ses yeux parlent pour lui lorsqu’elle laisse présager un repas. Un met pour combler la bête ou alors l’homme, c’est à lui de choisir. C’est alors que le loup s’avance vers la plat caché sous la cloche, il tourne autour, se laisse enivrer par la délicieuse odeur. L’envie de ce plat serait-elle plus forte que la peur de se montrer tel qu’il est vraiment. Elle ne bouge pas, ne voulant pas rompre quoi que ce soit, surtout s’il choisit de lui apparaitre enfin sous sa vraie nature. C’est alors ….

Sous  les yeux de Maléfique, le loup cède la place, son souffle change devient plus saccadé. Elle se doute qu’il souffre comment pourrait-il en être autrement ? Elle laisse ses yeux se perdre au fond des siens, ressentant chaque changement, chaque craquement d’os. Elle glisse son regard sur son corps qui petit à petit prend forme humaine, le pelage doux disparait sous la peau sale et claire. Les bras et les jambes reprennent leur place, les mains et les pieds se dessinent. Tout se fait en douceur, mais dans la douleur. Elle ne peut être qu’admirative du spectacle qui lui offre dans le silence de cette terre aride et brulée. Puis leur regard se croise à nouveau, mais cette fois elle ne voit pas les yeux d’un loup. Elle voit des yeux d’humain d’un bleu profond et terriblement troublant. Elle lui sourit, ne sachant exactement comment il va interpréter son geste, mais pour elle c’est comme un signe de remerciement. Elle est heureuse au fond qu’il est choisi de se montrer enfin tel qu’il est vraiment.  Elle le laisse refaire connaissance avec son corps, vu dans l’état qu’il est, il devait loup depuis pas mal de temps. Alors elle le regarde s’observer. Elle voit les marques sur sa peau, certaines sont anciennes et cicatrisées, d’autres plus ressentes et pas encore fini de guérir. Avec difficulté il se redresse sur ses jambes, depuis combien de mois n’a pas été sur ses deux pieds ? Il titube comme un enfant qui découvrirait son équilibre. Un enfant c’est tout à fait cela, d’ailleurs il est là face à elle, nu et sale comme un nouveau né sortant du ventre de sa mère. La différence c’est que c’est un corps d’homme qui s’offre à elle, même s’il est amaigri, ravagé par la transformation,  elle ne peut qu’admirer son corps d’homme.  « Bonjour »

Elle est presque surprise de l’entendre parler, sa voix est si fine, si fluette, comme venu d’ailleurs. Du coup il la fait presque sursauter, voilà ce que c’est quand on observe de trop prêt la nudité d’un homme. « Bonjour » Répond t-elle doucement surprise de s’être laisser surprendre dans l’observation de certaines parties de l’anatomie du jeune homme.  « Tu vas bien. » La demande peut paraitre anodine, mais se changer de bête en humain après tant de temps est éprouvant pour le corps et l'esprit. Jamais elle n'est restée des jours sous la forme d'un dragon mais c'est toujours compliqué de reprendre ses marques, dans un sens comme dans l'autre. Leurs yeux se croisent à nouveau. Les yeux de Maléfique sont rempli disons d’admiration par rapport à ce qu’elle voit. Alors que ceux du jeune homme sont encore plein de doute à son sujet. « Tu veux manger maintenant ici dans le froid et dans cette tenue … Personnellement cela ne me dérange pas. » Ses yeux glissent à nouveau sur le corps du jeune homme. « Ou tu veux te nettoyer et te vêtir avant de savourer ce délicieux repas. Il y a tout ce qui faut chez moi et on pourrait y être en un rien de temps. » Elle a fait disparaitre de sa main le morceau de viande rouge, mais à laisser dans l’autre le plat sous cloche, elle l’a même libéré de sa magie. S’il veut le dévorer maintenant en tenue d’Adam, elle ne s’y opposera pas. Après tout il a l’air d’avoir si faim. Il pourra accepter peut être par la suite de la suivre pour se rendre plus présentable, à part qu’il ne décide une fois restauré de reprendre sa forme de loup. « Je m’appelle Maléfique et je vis ici .. à vrai dire ses terres sont pratiquement toute à moi. Et toi tu es ? » Elle s’avance vers lui, lui tendant le plat comme promis. Mais s’étant libéré une main elle fait apparaitre à ses pieds une couverture. Qu’importe la solution qu’il  choisisse, il doit avoir froid sans son pelage. Il est peut être même gêné d’être nu face à elle. « Couvres toi, après tu décideras. » Et elle soulève la cloche, finissant ainsi de libérer l’odeur alléchante du plat de viande rôti accompagné de légumes.

Maléfique tend son bras vers lui. Lui seul est à même de décider ce qu'il veut faire. Lui seul peut choisir de manger là sale, au froid mais en sa compagnie. Ou alors de la suivre et d'accepter son hospitalité pour quelques heures. Regouter pendant ce temps au plaisir d'être un humain. Elle a tant de question à lui poser, tant de chose à lui demander. Après il pourra très bien refuser de répondre, mais quand on est resté bête si longtemps un peu de chaleur humaine n'est pas fait pour déplaire.

Perdre sa forme lupine était probablement l'idée la moins judicieuse au monde, surtout face à un être qui maitrisait les magie et en parfaite condition physique. Randall venait de marquer une inégalité terrible entre eux d'autant plus qu'il devait à nouveau faire fonctionner son esprit et son corps comme un homme ce qui n'était pas simple après avoir enfuit toute trace d'humanité trop loin dans un coffre fermé à double tours. De toute manière on ne lui demandait pas de faire revenir tout un tas d'émotions futiles et désagréables, il se contenterait de les feinter pour paraître un tant soi peu humain. Il en avait certes l'apparence, mais était à des kilomètres d'être un homme, il restait la bête, le monstre, le dévoreurs de tout une comptée au cœur devenu aussi aride que ces terres.

Il fronça les sourcils à sa demande. Techniquement se retrouver dans un désert, affamé, sur les rotules et sur deux jambes tout ça parce que son estomac l'avait presque forcé à se changer, ce n'était pas vraiment ce qu'il y avait de mieux. « Je crois, oui. » Mauvaise réponse, enfin on va mettre ça sur le compte de l'étourdissement post-transformation. Plus il avançait et plus il regrettait ce choix d'exposer sa vulnérabilité humaine au grand jour.

Enfin soit passons à la suite puisqu'un grondement digne d'un ogre s'échappa à nouveau de son estomac lorsqu'elle mentionna à nouveau la nourriture et appartement un gîte. Et si c'était un piège mh ? Avoir un loup-garou domestique pourrait être un sacré avantage pour certaines personnes, bien que dangereux. D'un autre côté si on reprenait les codes humains, enfin s'il parvenait à se les remettre en tête, il serait plus qu'inconvenable de se ruer sur de la nourriture, nu, couvert de crasses, comme un loup à vrai dire. Puis tout bien considéré, un peu de confort ne serait pas du luxe vu le chemin parcouru et le temps qu'il avait passé dehors loin de tout être ressemblant de près ou de loin à un humanoïde.

« Randall loup vagabond. » Au moins il était franc, il n'avait rien à faire ici et le reconnaissait. De tout manière il n'avait pas vraiment d'attache pour un lieu en particulier, enfin plus maintenant. Il esquissa tout de même un sourire en coin histoire de paraître un minimum sociable, même si ce genre de coutume était du genre à le faire vomir. Il posa ensuite les yeux sur la couverture et la gratifia d'un hochement de tête avant de la saisir pour s'enrouler dedans. S'il se fichait bien de sa tenue, il allait tout de même faire l'effort de se couvrir face à une femme. Il s'efforça de ne pas trop penser à la cloche, bien que l'odeur plus forte arriva à ses narines bien que son odorat ait perdu toute sa finesse.

« Et bien je pense qu'il serait plus qu'inconvenable de refuser une telle offre et de partir comme un voleur, surtout si gentiment proposé. » Nouveau sourire, plus large, même si l'idée de marcher sur deux jambes ne lui plaisait pas forcément avec une telle maladresse même s'il finirait par vite s'y habituer de nouveau. Mais au moins ça lui changerait de rester dans sa bulle en tant que loup solitaire. Cette Maléfique avait de la chance, il n'avait plus ouvert la bouche depuis longtemps et ce n'était pas le genre de choses qui arriverait à nouveau de si tôt.